Dersim 1938... Un lieu, une date, parmi les plus sombres de lhistoire de la Turquie du 20- siecle. De hautes montagnes souvent enneigees, flanquees de vallees verdoyantes habitees par une mosaYque de tribus kurdes ayant une forte identite culturelle et vivant en quasi autonomie. Un fleuve, le Munzur, et des ravins, de profonds ravins 01i seront precipites des dizaines de milliers de victimes entre mai 1937 et juillet 1938. Les habitants de la region de Dersim etant en grande majorite kurdes et alevis, ils sont a ce titre, consideres comme des rebelles en puissance, des leur naissance. Le massacre - operation militaire - lance sous lapparence dune reponse a un evenement mineur, est en realite un pretexte pour enfin yenir a bout de ces Turcs des montagnes qui resistent au gouvernement central. Dersim est devaste, la population aneantie, les survivants sont deportes, des enfants disparaissent. Apres plus de 70 ans, les responsables nont jamais ete juges, les faits reels nont jamais ete eclaircis. La plaie est toujours beante, Dersim rebaptise Tunceli du nom de loperation militaire est aujourdhui encore convalescent. Les massacres sont longtemps restes des secrets de famille a peine murmures, sit6t etouffes. En 1938, Bego a 10 ans. Il est temoin, victime et survivant. Il raconte, puisant dans ses souvenirs et retrouvant ses mots denfant, le drame, les proches extermines, la fuite et lerrance, puis la vie qui reprend son cours sans jamais panser les blessures. Il raconte lindicible enfoui des decennies durant dans son subconscient, et cest sa fille qui prend le relais, perpetuant la memoire de Dersim et se faisant le passeur de cette histoire - celle dune famille et celle de tout un peuple - si longtemps occultee.