Le roman de la femme quittée est un topos de la littérature française, plus rares sont les romans de l'homme quitté dans sa vieillesse par une femme jeune.
« Le bonheur ancien m'étouffe. Il me chasse du présent, m'interdit l'avenir » : Lucien, un romancier français de mère turque, âgé de 68 ans, est dans un état de douleur hébétée depuis qu'il a été abandonné par sa femme Zoé, éditrice romancière d'origine italienne de 33 ans.
La tristesse brouille la chronologie du passé. En chapitres brefs, Lucien reconstitue la ronde de sa petite « bande de Saint-Germain des Prés », composée de trois amis sexagénaires en couple avec de jeunes trentenaires qui se trouvent être toutes écrivaines : l'ami de jeunesse Bob, chanteur célèbre, partage la vie de la jeune russe Natacha ; les deux éditeurs de Lucien, Eric et Guillaume, vivent respectivement avec Gwendoline, slovaque d'origine congolaise et Maria, grecque.
La solitude, l'abandon, la mort qui rôde, l'écriture pour survivre, les jeux de l'amour et du hasard, les combinaisons et combinatoires possibles entre écrivain(e)s et éditeurs/trices, la folie des prix littéraires, le caractère incestueux du petit monde des lettres parisien : autant de thèmes abordés ici sur un registre tour à tour désespéré et comique par un Besson à la dévastation tonique, particulièrement en verve dans l'autodérision et le lâcher-prise, et qui garde intact son sens de la formule (« l'italienne a été mon ambulance avant d'être mon corbillard »... « la vieillesse est une adolescence sans avenir »... « la passion : comédie pas intelligente qui tourne mal »...)